lundi 5 mai 2008

Pas de retraite possible

Le débat qui agite la sphère politicienne et syndicale est en ce moment, celui des retraites.
Beaucoup plus que l’assurance-maladie (dont la baisse du déficit encourageante mais non déterminante due aux premiers effets de la réforme de 2004 est demeurée inaperçue ou presque), le système de retraite incarne l’état-providence « à la française ».
Philosophiquement, parce qu’il représente un mécanisme de solidarité (intergénérationnel dans ce cas).
Financièrement, parce que le système est menacé d’implosion.

La réforme proposée relève du bon sens : il sera nécessaire de travailler plus, ne serait-ce que pour sauvegarder à court terme, l’existence même de pensions tout comme il est nécessaire d’encourager le travail des « seniors » dont la faible activité a fait l’objet jusque là d’un consensus entre les organisations patronales et syndicales ainsi que de l’état, le tout (il faut bien le dire) sur le dos du contribuable.

L’assurance-vieillesse fait partie de ces mythes qui ont fondé la Sécurité sociale française.
Et comme tous les mythes, elle a été l’instrument du populisme le plus certain. Et comme dans beaucoup de cas, ce qui satisfait, n’est pas forcément ce qui est nécessaire.
Ainsi de la Retraite à 60 ans mise en place par les Socialistes dans les années 1980 alors même que l’on connaissait plus ou moins les difficultés qui allaient s’accumuler dans les décennies à venir en matière de financement du régime général. A l’hystérie socialiste (la formule du « demain, on rase gratis » … sur le dos des « riches ») la droite répondait par quelques timides pas en avant (nécessaires mais non suffisants) : l’augmentation de la durée de cotisation ayant été la piste privilégiée.

L’évolution de l’assurance-vieillesse est aussi une parfaite illustration de l’évolution de la France au cours de ces 25 dernières années : à l’encontre du bon sens et des politiques de ses voisins. Pendant que la Grande-Bretagne dérégulait (certes de façon brutale), la France nationalisait, tandis que les pays scandinaves ou le Canada résorbaient leur dette nationale et diminuait leur dépense publique, la France les voyait croître à vu d’œil, pendant que l’Allemagne renonçait aux 35h, la France les instituait.
Même en matière de gestion du problème des retraites, il y a urgence : la GrandeBretagne et l’Allemagne ont décidé d’augmenter l’âge de départ à la retraite et les pays scandinaves et les Pays-Bas ont favorisé l’emploi des travailleurs âgés (les « seniors »).

La réforme planifiée sera certainement insuffisante. Ne serait-ce que parce que faire varier la durée de cotisation n’est pas suffisant et que c’est bien le problème de la « Retraite à 60 ans » qui aujourd’hui se pose, même si celle-ci du fait même de la nécessité d’accomplir au moins 40 ans d’annuités (et 41 ans à partir de 2012) reste assez hypothétique.
Faire augmenter l’âge de départ à la retraite apparaîtra à terme comme symbolique même si politiquement risqué. Symbolique car une telle augmentation ferait plus facilement prendre conscience aux Français qu’il faut travailler plus longtemps dans leur intérêt même et celui de leurs enfants. Politiquement risqué car la « Retraite à 60 » ans apparaît à beaucoup de Français comme un « droit acquis » (comprendre « il ne faut pas y toucher »).
Le Conseil d’Orientation des Retraites commence d’ailleurs à s’y pencher et à souligner l’effet bénéfique d’une telle réforme sur les finances de la branche « Assurance-vieillesse » de la Sécurité sociale.

Il s’agit par ailleurs, du premier test « grandeur nature » du gouvernement.
La demi-réforme des régimes spéciaux avait été une formalité car soutenue par les Français. La CGT ne s’y était pas trompée, se contentant d’une grève d’un jour, un « baroud d’honneur » pourrait-on dire.
Ici, hormis la CFDT qui reste confuse dans ses revendications, tous les syndicats s’affichent comme opposés à la réforme même si ils demeurent divisés sur leurs propositions.
Le gouvernement a bien compris sa chance : maniant le bâton (passage à 41 ans d’annuités dès 2012 non négociable) et la carotte (pistes en faveur de l’emploi des seniors), il cherche à désarmer le front syndical qui tente (avec peine) de se former et qui, déjà, annonce une journée d’action le 22 mai prochain.

Le gouvernement a aussi compris que ce test d’avère déterminant pour la suite de sa politique vis-à-vis non seulement de l’Opposition tant syndicale que parlementaire, que des Français (et notamment de ses électeurs).
S’il recule sur ce thème, il ne sera plus crédible pour mener d’autres réformes. C’est au-delà du problème des retraites, tout l’enjeu de la manœuvre.

En clair, et Nicolas Sarkozy l’a bien laissé entendre lors de son interview télévisée : sur le thème de l’assurance vieillesse, il n’y a pas de retraite possible.

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